Cette nouvelle traduction ouvre la voie de la popularisation des œuvres de Freud, qui passent dans le domaine public, soixante-dix ans après la mort de leur auteur. La présentation de la psychanalyste Clotilde Leguil, tout comme la traduction de Bernard Lortholary, sont abordables et illustrent la volonté du Seuil de mettre à la portée de tous l’œuvre freudienne.
Dès le titre, tout est question de traduction. Ce texte majeur de Freud est paru fin 1929 et antidaté de 1930 – même procédé que pour la Traumdeutung – sous le titre Das Unbehagen in der Kultur. Alors que les précédentes éditions donnaient une traduction littérale en rendant Kultur par «culture», le Seuil a choisi l’option «civilisation». Rappelons que Freud donne déjà une définition élargie de ce qu’il entend par Kultur dans L’avenir d’une illusion (1927), y déclarant qu’il «dédaigne de séparer la civilisation de la culture». Mais pour qui est sensibilisé au sens fort du terme allemand Kultur, il est possible de le restituer par le mot Culture comme «le principe civilisateur» même. Le terme Unbehagen recouvre quant à lui plusieurs significations, qui désignent toutes un état de «malaise» ou d’inconfort. Le titre fixe le programme de Freud, ambitieux: donner une définition claire de ce malaise imprégnant la culture qui l’a créé, et de ses causes profondes.
Tout traducteur doit faire face à des partis pris de lecture, car le passage d’un idiome à un autre, loin d’être linéaire, se fait par les détours de la logique propre à une langue donnée. En ce sens, toute traduction est une interprétation.