Les traductions de Arthur Conan Doyle ou d'Agatha Christie, réalisées à la va-vite, étaient connues pour leur médiocrité. Pire, le plus célèbre ouvrage de tous les temps, la Bible, fut, lors de son passage en latin, victime de la plus mémorable bourde de l'histoire de la traduction. Jérôme, dans sa "Vulgate" latine, au lieu de parler de "Moïse couronné", opta pour un mémorable "Moïse corné". Erreur qui ne gêna pas Michel-Ange lorsqu'il coiffa Moïse d'une paire de délicieuses petites cornes.
Alors quoi, la traduction n'influe en rien le destin d'un livre? Non, bien sûr. Ces exemples prestigieux restent des exceptions. Si la qualité de la traduction ne fait pas le succès d'un ouvrage, elle y participe grandement. Un seul contre-exemple suffit d'ailleurs à discréditer l'inutilité de la traduction: le succès d'Edgar Allan Poe en France fut évidemment dû à la traduction, superbe, qu'en fit Charles Baudelaire. Et comment ne pas voir derrière le public toujours large que rencontre Samuel Beckett la marque de la qualité de ses textes, qu'il était capable d'écrire ou de transcrire lui-même en français? L'auto-traduction reste une exception, un idéal.
"Une bonne traduction, c'est de pouvoir lire un livre traduit sans penser qu'il s'agit d'une traduction, tout en sentant que ce livre vient d'ailleurs", précise une traductrice.